La trempe cryogénique

Rédigé dans le cadre de la commission « Fluides et systèmes de trempe »

N.B : Les informations contenues dans cette fiche proviennent de sources dignes de foi. Néanmoins, elles sont fournies sans aucune garantie, expresse ou tacite, de leur exactitude.


1.   OBJET

Création d’un chapitre dédié pour l’ouvrage « les fluides de trempe. Note : les paragraphes 1 à 3 sont quasiment intégralement repris depuis la page Internet de l’A3TS dédiée au traitement cryogénique (http://www.a3ts.org/actualite/commissions-techniques/fiches-techniques-traitement-surface/traitement-par-le-froid-ou-traitement-cryogenique-ou-sub-zero/)

 

2.   Principe

 Le traitement par le froid (ou traitement cryogénique) consiste à refroidir les pièces mécaniques en dessous de la température ambiante après un traitement thermique de trempe. La température de maintien se situe entre 0°C et -150°C (le plus souvent entre -80 et -100°C pour les aciers).

2.1.  Justification du traitement par le froid sur les aciers

La nécessité d’atteindre une température inférieure à la température ambiante suppose que des transformations métallurgiques peuvent intervenir pour des températures atteintes inférieures à celle-ci. C’est le cas notamment de certains alliages fer-carbone pour lesquels le point Mf de fin de transformation de l’austénite en martensite est lui-même inférieur à 0°C, d’où la subsistance après trempe d’austénite résiduelle (ou austénite retenue).

Mf dépend de la teneur en carbone et de la composition chimique en éléments d’alliage.

Mf (°C) = (361 à 461) – 474 (C %) – 33 (Mn %) – 14 (Cr %) – 21 (Mo %)
(Loi de Steven et Haynes) pour les aciers faiblement alliés.

Mf est inférieure à 0°C dès l’instant que la teneur en carbone est supérieure à l’eutectoïde (0,8 % de carbone en l’absence d’éléments d’alliage), d’où un risque accru d’austénite résiduelle après un traitement de cémentation.

L’existence d’austénite résiduelle dans la structure constitue une situation instable, celle-ci se décomposera si la température s’abaisse suffisamment pour atteindre la température Mf. Elle pourra également se transformer sous l’action de conditions déstabilisantes : fortes contraintes, vibrations, efforts cycliques, fonctionnement en température proche de celle du revenu.

L’austénite se décomposera alors de façon non maîtrisée en martensite (dite parfois martensite secondaire) en produisant des déformations volumiques et des risques de surtensions locales pouvant aller jusqu’à la fissuration. Cette martensite non revenue est par ailleurs fragile.
A côté de la martensite, l’austénite est un constituant de faible dureté. Sa présence se traduit par des plages douces.

Le traitement par le froid aura donc pour effet sur les aciers contenant de l’austénite résiduelle :

  • d’augmenter la dureté et la limite élastique avec corrélativement une baisse de résilience et une augmentation des contraintes internes,

  • d’augmenter la stabilité dimensionnelle des pièces. Il est ainsi particulièrement recommandé pour les calibres, les éléments à jeux très serrés.

Il est indispensable sur les organes mécaniques destinés à être montés par ajustement serré, par frettage à l’azote liquide ou travaillant à des basses températures (cas des éléments d’organes cryogéniques ou des pièces de structure aéronautique).

2.2.  Justification du traitement par le froid sur les alliages d’aluminium

Après trempe les alliages d’aluminium aptes au durcissement par traitement thermique sont au maximum de leur malléabilité (état de trempe fraîche), ils durciront par revenu ou par maturation vieillissement. Sur les pièces devant subir des opérations de déformation ou calibrage entre la trempe et la mise au niveau de dureté final, l’état malléable est maintenu en faisant séjourner ces pièces dans un caisson froid de façon a retarder le départ de la maturation. Ce séjour permettra de prélever les pièces au fur et à mesure des disponibilités des équipements de déformation avant que la maturation ne s’engage.

3.   APPLICATION DU TRAITEMENT PAR LE FROID

Applications industrielles sur les aciers :

  • Outils de déformation

  • Outils de coupe

  • Pièces en fontes alliées extra dures

  • Pièces cémentées

  • Calibres et jauges

  • Poinçons de découpe de précision

  • Pièces aéronautiques

3.1.  Précautions de mise en œuvre

L’immersion dans un milieu à très basse température constitue un choc thermique pouvant amener des risques de tapures. C’est la raison pour laquelle on pourra préconiser un revenu de détente à faible température (125°C par exemple) de façon à réduire la fragilité de la martensite qui va être exposée au froid et aux contraintes de la formation de martensite secondaire, même si cela peut stabiliser l’austénite résiduelle. On privilégiera l’immersion dans une enceinte à air refroidi plutôt que dans un liquide froid tel que l’azote liquide ou les mélanges azote – alcool.

Après passage au froid, l’austénite préalablement retenue est totalement transformée en martensite fraîche qui doit être rapidement soumise à un revenu de détente afin d’éviter les risques de tapures différées.

3.2.  Types de matériaux adaptés à l’application

  • Aciers X100CrMo17, X200Cr12, 90MnCrW 5

  • Aciers rapides et semi rapides

  • Aciers cémentés : 16NiCr12, 16CrNiMo13, 20NiMo14, 16CrMn6, etc.

  • Aciers pour roulements type 100Cr6

Exemples d’application de gammes types :

Calibre fileté matière X200Cr12

  • Ebauche globale

  • Usinage finition et filetage avec réserve de rectification

  • Trempe

  • Revenu 180°C

  • Passage au froid – 80°C

  • Revenu 180°C

  • Rectification

Pièce aéronautique X100CrMo17

  • Usinage ébauche

  • Stabilisation

  • Usinage finition

  • Passage au froid – 80°C

  • Revenu 160°C

  • Passage au froid – 80°C

  • Revenu 160°C

  • Passage au froid – 80°C

  • Revenu 160°C

Application sur les alliages d’aluminium

Exemple : sur pièce en alliage 7075 après trempe fraîche maintien inter opération en chambre froide à –23°C, capacité à ramener de la température ambiante à – 23°C en moins de 15min, sans dépasser – 18°C dans la chambre.

4.   Mise en œuvre

 4.1.  Matériel utilisé

  • Caisson isothermique d’azote liquide

  • Armoire réfrigérée par compresseur (température limite – 100°C)

  • Armoire réfrigérée par serpentin à circulation d’azote liquide (le débit d’azote régule la température)

  • Cellule cryogénique : le fluide cryogénique (azote ou CO2 liquide) est injecté directement dans la cellule selon un débit adapté aux caractéristiques des produits. Un système de ventilation assure la vaporisation rapide du fluide cryogénique et une homogénéisation des températures :

Figure 1 : cellule Silversas™ (crédit Air Liquide®)

  • Four de traitement thermique de trempe et/ou revenu équipé pour le traitement cryogénique.

Exemple : fours SCHMETZ® et BMI® équipés du system « cool plus » développé et breveté par SCHMETZ®. De l’azote liquide (-196°C) vaporisé uniformément et directement dans la chambre de chauffe sous vide est brassé de manière homogène à l’aide de la turbine de convection. La chaleur est extraite par la tuyauterie d’évacuation spécifique dans laquelle est réalisée une mesure de température. La régulation de température agit sur du débit d’azote liquide injecté en comparant la température de consigne à la mesure effectuée dans la tuyauterie d’évacuation et/ou dans l’enceinte du four.

Figure 2 : four de revenu et traitement cryogénique B54RC (crédit BMI®)

Figure 3 : four de revenu et traitement cryogénique B54RC
– vue de face, porte ouverte (crédit NTN-SNR)

Figure 4 : four de revenu et traitement cryogénique B54RC
– vue de l’intérieur de l’enceinte de traitement (crédit NTN-SNR)

Figure 5 : four de revenu et traitement cryogénique B54RC
– vue de l’arrivée et de l’extraction de l’azote de traitement cryogénique (crédit NTN-SNR)

4.2.  Contraintes d’utilisation

Les cellules et fours permettant un traitement cryogénique basé sur la vaporisation d’azote liquide peuvent s’avérer gros consommateurs de fluide. Il faudra donc veiller à dimensionner les installations de stockage et distribution d’azote liquide en conséquence. Le réseau de distribution est spécifique et il est conseillé d’utiliser des canalisations à double paroi sous vide afin d’éviter le réchauffage.

Un certain nombre de spécifications et normes considèrent la fin de trempe cryogénique comme un traitement thermique de trempe « standard ». Les moyens mis en œuvre doivent donc être suivis de la même manière d’un point de vue pyrométrie, enregistrement des données, maintenance, etc.

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